Dans la modernité, selon Jean-François Lyotard[1], « l’idée du grand récit arrive vers sa fin ». Dieu, comme idée universelle, n’est plus là. Sa personne est remplacée par l’esthétique, la citoyenneté, le drapeau, la raison, la nature. On pourrait dire : « à chacun quelque chose selon son choix ». Marcel Gauchet[2] nous parle du « désenchantement du monde ». Il entend cette expression comme le recul des croyances religieuses sous la forme de l’explication des phénomènes, qui s’accompagne d’une perte de sens du monde, dès lors que celui-ci peut être scientifiquement expliqué.

Bien évidemment, dans sa pensée, Marcel Gauchet élargit le concept wébérien (Max Weber – 1864-1920) de « désenchantement du monde » qui devient « l’épuisement du règne de l’invisible » dans le monde d’ici-bas. Pour l’auteur, le christianisme portait déjà en lui les germes de cette sortie de la religion qui caractérise le monde moderne. Cette sortie ne signifie pas obligatoirement la fin du religieux, mais signe simplement la fin de cet état natif où la religion constituait de fond en comble l’habitation du monde et réglait l’ordonnance des êtres. Gauchet brosse un tableau du religieux comme phénomène historique et repère ses transformations dans le temps. Pour lui, l’histoire du religieux est celle de sa remise en question. Il applique cette analyse au christianisme qui a constitué le fondement du développement de l’Occident, dans la continuité du judaïsme et avec l’apport de la pensée philosophique grecque. Pour Gauchet, la religion comme institution n’a pas d’avenir, mais elle continuera d’exister à travers la culture et comme expérience personnelle.

 

1. L’effacement du religieux dans la société moderne

Naturellement, la religion ne joue pas aujourd’hui le même rôle dans la vie des hommes qu’auparavant et on peut critiquer en souriant certaines tendances de l’époque qui expliquent le refus du monde par l’imperfection d’un monde déchu, par l’impureté de la chair par rapport à la splendeur divine. Comme le dit M. Gauchet, le refus du monde au nom de la vraie vie éternelle constitue encore un chemin vers l’immobile, à l’instar des idéologies de la fin de l’histoire (du communisme au libéralisme), une réaction de défense contre le changement, un acte libre qui se renie immédiatement dans l’engagement le plus définitif.[3] Seulement il ne faut pas oublier qu’il serait peut-être plus utile de réfléchir à la manière de valoriser ou de re-valoriser le monde, même si, aux yeux de nombreuses personnes, il reste « déchu » ou « impur », plutôt que d’analyser des anciennes tendances.

Face au « désenchantement du monde », nombreux sont ceux qui posent la question suivante : comment « enchanter le monde » ? Comment, et quel modèle de vie aujourd’hui faut-il proposer aux jeunes, quel type de monde leur laisser ? Remarquons en passant : le monde qui, hier encore, était associé, aujourd’hui est dissocié… et en même temps les voix s’élèvent pour dire maintenant qu’il ne faut pas se soucier de « ré-enchantement » du monde, qu’il faut laisser s’écouler le passé et s’employer à envisager l’avenir. (Ré)-enchanter le monde ? Mais pour quoi faire ? Dans quel sens faudrait-il l’envisager et dans quelle direction éventuellement ?

L’abbé Henri Grégoire[4] visait à son époque à obtenir la « ‘régénération’ complète de la société et de l’individu ». Il voulait y arriver, bien évidemment dans des circonstances différentes des nôtres, mais pour le bien d’une société qui se trouvait alors en crise. Le système ancien était arrivé à la « fin » de son histoire et il fallait proposer quelque chose de nouveau ou bien, au minimum, changer quelque peu les bases de la vie en société. Bernard Stiegler[5] semble appeler, dans les réalités postmodernes aujourd’hui, à des entreprises semblables très exactement : à la « refondation de l’entreprise humaine en général ».[6]

En suivant la pensée de Gauchet, on peut constater que le phénomène du « désenchantement du monde » ne pose aucun problème, mais en même temps, l’auteur ose dire que « le déclin de la religion se paie en ‘difficulté d’être soi’ ». Selon Gauchet, le « désenchantement » représente un monde qui n’est plus organisé par la religion, et c’est donc à ce moment-là qu’il commence vraiment.

Ré-enchanter le monde donc ? Pourquoi pas ? Mais peut-être de manière foncièrement différente en suivant plutôt la pensée de Stigler et dans un sans plus large que celui utilisé par M. Gauchet. Peut-être, en ce temps de crise économique mondiale, nous faudrait-il, pour en amorcer une sortie correcte, et comme nous le suggère justement B. Stigler, « revisiter le rôle de l’esprit (et non d’abord de la religion proprement dite) dans l’organisation de l’économie »[7] ? Mais moraliser le libéralisme ? Et pourquoi s’engager dans cette voie ? Peut-être pour rendre le monde plus humain, plus prévisible, peut-être un peu plus surveillé, mais avec des lendemains plus tranquilles ? En tout cas, par son engagement au sein d’Ars Industrialis, Stigler nous met en garde contre le populisme industriel ; contre « le règne de la bêtise et la production du cerveau sans conscience ».[8] Afin de nous éviter de devenir, non seulement des êtres « post-humains », mais des êtres « inhumains » - il nous invite à la « formation et la culture d’une nouvelle conscience humaine ; à l’intelligence du monde et au sens de responsabilité »,[9] en somme à l’« individuation ».[10] Et pourquoi encore ? Pour, d’après Robert Lyon, « se situer du côté de l’être plutôt que de l’avoir » et rendre le monde, selon la belle expression de Stigler, « plus désirable ». Cofondateur d’Ars Industrialis souligne : « Nous, les humains du début du XXIème siècle, nous savons qu’il nous faut devenir plus lucides, plus spirituels et plus responsables que jamais, et nous savons en même temps que jamais l’humanité n’a été aussi aveuglée, abrutie et irresponsable. Nous le savons parce que nous constatons que presque toute la vie sociale est désormais contrôlée par l’industrie des temps de cerveaux disponibles qui détruit la conscience individuelle et collective ».[11]

Pour définir le statu quo de la religion, revenons à notre analyse du début du XIXème siècle. Il nous semble juste d’oser le constat que c’est consécutivement à la Révolution française, que l’Eglise d’Occident eut à affronter une crise majeure, celle de la fin d’un régime de chrétienté. La rupture déboucha sur la modernité avec, notamment, une sécularisation qui nous touche toujours en profondeur, tant elle bouleverse les rapports société – religion.

La France du XIXème siècle vit donc une époque de transformation, de rupture politique et culturelle qui déstabilise notamment l’Eglise, enracinée dans un terreau socioculturel mis à mal par la Révolution. Avec l’avènement de la démocratie, c’est au peuple souverain et non plus à l’institution ecclésiastique, de statuer sur les fondamentaux de la société. Un nouveau paysage politique et sociétal se dessine, dans lequel le christianisme n’exerce plus de fonction de régulation.

Tout en exprimant son accord sur les principes, Dany-Robert Dufour, dans son livre intitulé : « Le Divin Marché. La révolution culturelle libérale » nous dit même que cet état de choses persiste depuis plus longtemps : « D’un côté, il est manifeste que les hommes sortent de la religion. Continûment. Régulièrement. Considérons en effet cette question depuis la Renaissance, début de notre modernité. Je l’ai déjà écrit : il est aisé de constater que, depuis Machiavel, nous n’avons plus besoin de Dieu pour faire de la politique, c’est-à-dire pour faire fonctionner nos sociétés. Depuis Newton, nous n’avons plus besoin de postuler Dieu pour que l’univers physique tienne. Depuis Kant, nous n’avons plus besoin de poser Dieu pour disposer d’une métaphysique. Depuis Darwin, nous n’avons plus besoin de Dieu pour expliquer l’apparition de l’homme. Depuis Freud, nous n’avons plus besoin de Dieu pour rendre compte de nos rêves et de nos passions. Depuis Nietzsche, nous n’avons plus besoin de Dieu, tout court ».[12]

Comment donc la religion ou bien le religieux se présentent-t-ils à nous aujourd’hui ? Auraient-t-ils quelque chose à nous dire encore dans la société ?

Nous vivons le temps de la mondialisation, l’un des points caractéristiques de la postmodernité. Joseph Famerée[13], professeur à l’Université catholique de Louvain, remarque d’un coté, les avantages de cette situation ; la possibilité d’échanges entre les différentes cultures, ce qui peut se révéler très enrichissant : « Bien sûr elle permet un développement des échanges entre les diverses civilisations de la planète, elle tend à uniformiser les modes de vie et provoque ainsi un peu partout des réactions identitaires, à travers les religions notamment, qui sont souvent (ou ont été du moins), inspiratrices et stabilisatrices des cultures ».[14] D’un autre côté il exprime ses inquiétudes, avant tout, par rapport à une commercialisation sans frein et à un appauvrissement culturel dû à la négation des différences : « Cette pénétration des populations et des cultures, en raison des migrations, des voyages et surtout des médias, entraîne un certain nivellement culturel. Les modèles du style de vie, à cause de la publicité commerciale occidentale et plus particulièrement américaine ont tendance à s’imposer au monde entier, au point qu’on parle parfois de la culture Mac Donald mondiale ».[15]

 

2. Peut-on fonder, dans ce contexte, une morale universelle?

Ce brassage mondialisé, en raison même de la rencontre entre cultures différentes qu’il permet, engendre une relativisation des valeurs et structures traditionnelles de chaque culture: les solidarités familiales et rurales anciennes se délitent, les évidences culturelles, religieuses et morales anciennes sont ébranlées. Et même si nous entendons certaines voix s’élever au sein du gouvernement proposant le retour de la morale entre autres dans le cadre de l’enseignement public, il faut nous poser la question : de quelle morale s’agit-t-il ? Patrick Berthier[16] l’énonce ainsi dans : « Une morale sans fondement » : « Une morale française, une morale européenne, une morale pour tous les Français, pour tous les Européens, une morale nationale, communautaire, au sens de la Communauté européenne, est-elle possible ? »[17]

Les certitudes absolues d’hier sont aujourd’hui mises en question, voire remises en cause. Plus rien ne semble tout à fait sûr, que ce soit du point de vue de l’avenir professionnel de chacun, du point de vue du comportement moral à adopter ou du point de vue des vérités religieuses à croire. Chacun possède sa propre opinion. Notre monde est devenu très mobile et très mouvant.

Une révolution culturelle mondiale s’est produite directement après la chute du mur de Berlin de 1989 : un nouveau langage, de nouveaux paradigmes, normes, valeurs, styles de vie, méthodes éducatives et processus de gouvernance, appartenant à une éthique nouvelle – à la fois postmoderne et, dans ses aspects radicaux, post-judéo-chrétienne – se sont imposés avec un succès foudroyant partout dans le monde.

La nouvelle éthique se veut mondialement normative: dans la pratique, elle gouverne déjà. La majorité des intellectuels et des décideurs ont suivi les nouvelles normes et valeurs sans prendre le temps d’en étudier avec soin la provenance ni les implications, tandis qu’une infime minorité s’est montrée réactionnaire. Il semble que le discernement nécessaire n’a été fait ni par les uns, ni par les autres.[18]

J. Famerée se montre inquiet devant ce nivellement culturel provenant de la mondialisation. Il craint d’assister bientôt aux réactions violentes des subcultures et des minorités qui souhaiteront, peut-être, réaffirmer leur identité menacée par le cosmopolitisme de la mondialisation. Il constate : « Face à la relativisation des valeurs et des certitudes traditionnelles, certains individus et certains groupes ont le sentiment que leur identité culturelle et religieuse est fragilisée, voire mise en péril. Par crainte de la perdre, ils la réaffirment de manière radicale, fondamentaliste et intégriste, souvent nationaliste, contre ce qui semble la menacer, c’est-à-dire la plupart du temps, contre la culture moderne occidentale, qui tend précisément à ‘se mondialiser’, à influencer le monde entier. Ce fondamentalisme et cet intégrisme se manifestent sans doute le plus nettement au sein des religions. On pense ici bien sûr à l’islamisme au sein de l’islam. Mais ce fondamentalisme ou intégrisme n’épargne aucune religion monothéiste ».[19]

Donnons ici la parole à Marcel Gauchet qui observe très attentivement les composants de la réalité religieuse d’aujourd’hui. Il pose cette question cardinale : « Vivons-nous la ‘mort de Dieu’ (déjà annoncée comme définitive par Nietzsche) ou, au contraire, le retour du religieux ? » Il remarque d’un côté les croyances personnelles qui remplacent les dogmes de l’Eglise et de l’autre la montée des intégrismes et des fondamentalismes qui nous sautent aux yeux à travers les informations journalières.[20]

Marcel Gauchet essaie d’éclairer un peu plus toutes ces tendances contradictoires. C’est récemment, dans un dialogue avec Luc Ferry, qu’il revient au Désenchantement du monde (Gallimard, 1985) pour décrire les réalités d’aujourd’hui.

Dans ce livre vieux de vingt trois ans, Gauchet décrit le christianisme comme la religion de la « sortie de la religion » et en même temps il constate le fait de l’« individualisation de croire ». Pour bien le faire comprendre il dit : « Si fin de la religion il y a, ce n’est pas au dépérissement de la croyance qu’elle se juge, c’est à la recomposition de l’univers humain-social non seulement en dehors de la religion, mais à partir et au rebours de sa logique religieuse d’origine ».[21] En précisant davantage nous dirions que ce qui s’efface définitivement c’est une vision du monde structurée par la religion, une conception où le religieux « imprégnait » tous les secteurs de la vie publique et privée. En même temps, le religieux, comme aspiration vers l’absolu, comme réponse au sens de la vie ou de la mort, semble loin de disparaître. Nous voyons ainsi que la cohabitation du dépérissement des religions et une certaine permanence du religieux restent possibles.[22]

 

3. La place du religieux dans une société sans religion

Ce qui paraît intéressant dans cette situation, c’est la volonté de définir le statut de ce religieux-là dans un univers laïcisé. « Comment penser le religieux après la religion ? » Voilà une question essentielle étudiée par M. Gauchet et L. Ferry et, ce qui est remarquable, selon une approche très différente.

Luc Ferry analyse l’époque dans laquelle nous vivons comme le croisement de deux processus : d’une part, ce qu’il appelle l’« humanisation du divin », d’autre part: la « divinisation de l’humain ». A travers l’« humanisation du divin », il considère que l’histoire culturelle moderne consiste dans la traduction des contenus théoriques et pratiques de la religion en un langage qui se révèle compatible avec l’individu érigé en valeur cardinale. La « divinisation de l’humain » – selon Ferry – est le fait qu’au cœur de l’individualisme autonome, condition de l’homme moderne, « ré-émerge » toutefois « de la transcendance », une transcendance comprise non plus entre les hommes et l’au-delà, mais entre les hommes eux-mêmes. A l’aide de ces deux caractéristiques, Ferry nous annonce un « humanisme de l’homme Dieu ». Dans cet humanisme contemporain, le religieux n’est pas condamné à dépérir, au contraire, il est destiné à trouver une forme plus authentique. La « vraie » religion – selon Ferry – la religion la plus conforme à l’aspiration humaine, serait toujours devant nous, comme un horizon à explorer et à construire.[23]

Marcel Gauchet ne partage pas ce point de vue, tout en observant le progrès constant effectué dans la rationalisation des dogmes et dans l’approfondissement des notions du divin.[24] Il considère qu’une interprétation non religieuse de la transcendance est possible. Pour lui, nous vivons l’époque d’une séparation et d’un éloignement continuel de l’homme par rapport à Dieu. L’humanisme qui serait à inventer de nos jours, serait celui de « l’homme sans Dieu » et de « l’homme définitivement et irrévocablement sans Dieu ». Gauchet est convaincu qu’un « absolu terrestre » va remplacer la figure historique du sacré, même si les modalités et les formes restent encore à identifier.[25]

Comme nous l’avons dit plus haut, pour lui nous vivons « la sortie de la religion » (de la religion qui construisait la société) et le retour du religieux dans ses multiples formes, parfois dangereuses, mais surtout dans la sphère du privé. Pour Gauchet, il n’y a pas ici de contradiction, mais il ajoute que ces deux tendances peuvent coexister en plénitude uniquement aux Etats-Unis où la société fonctionne selon une logique séculière et même, plus matérialiste que partout ailleurs, et abrite cependant un peuple religieux. Il constate aussi que pareille situation ne devrait pas se répandre ailleurs car ce sont des circonstances historiques exceptionnelles qui ont créé cette combinaison d’athéisme social et de croyance individuelle.[26]

Il est intéressant de noter, que Dany-Robert Dufour, dans son ouvrage intitulé : « Le Divin Marché » reprend déjà le même argument pour contester la théorie de Gauchet. D.-R. Dufour trouve que la théorie de la « sortie de religion » est une thèse au mieux franco-française, qui ne se vérifie pas ailleurs, notamment aux Etats-Unis. Il estime que si nous sortons de quelque chose, ce ne peut être que du transcendantal ; la transcendance, nous en sommes déjà sortis il y a deux siècles, avec les célèbres et bien nommées Lumières. Dufour constate que nous sommes en train de subir, dans les domaines esthétique, politique et psychique, les conséquences de l’effondrement actuel du transcendantal et non les problèmes de la sortie de la transcendance. Dans son analyse il va plus loin encore, en disant que selon lui, nous ne vivons pas la fin de la religion, mais au contraire nous y ré-entrons.[27]

Ceci est d’autant plus remarquable, que Marcel Gauchet lui-même dans l’un de ses plus récents ouvrages, « Un monde désenchanté ? », en défendant toujours sa théorie de la « sortie de la religion », ne se montre plus aussi ferme dans ses conclusion, qu’il l’était en 1985, quand il publiait « Le désenchantement du monde ». En 2004, il affirme que la « sortie de la religion » se poursuit, mais en provoquant en même temps, des réactivations et des réemplois du religieux qu’il ne faut pas – selon lui – confondre avec une restauration de l’organisation du monde selon la religion. Gauchet ajoute que ce fait ne s’oppose pas à la possibilité théorique d’un authentique retour du religieux. Cette possibilité demeure permanente, il faut seulement prendre en considération la rupture qu’elle représenterait par rapport à un développement qui n’a cessé de progresser depuis un millénaire en Europe.[28]

On peut constater que Gauchet, dans ses derniers écrits, s’ouvre un peu plus au dialogue avec tous ceux qui ne partagent pas son analyse au sujet du rôle de la religion dans la société contemporaine. Il dit : « Je veux parler de la réhabilitation publique du religieux qui accompagne son écroulement social dans les sociétés européennes. Il mérite qu’on essaye d’en prendre une vue d’ensemble, même succincte, au-delà de l’exploration de ses conséquences, qui sont multiples et subtiles ».[29]

Donnons encore la parole aux représentants de l’Eglise. Comment regardent-ils la « sortie de la religion » ? Evoquons d’abord ici la pensée de Claude Dagens[30], évêque d’Angoulême, auteur, il y 10 ans, de la « Lettre aux catholiques de France », récemment élu à l’Académie française. Dans son écrit « Méditation sur l’Eglise catholique en France : libre et présente », pénétré d’une claire vision de la réalité et en même temps animé d’espérance, il déclare : « Usée et stérile, notre Eglise, l’Eglise catholique qui est en France ? Peut-être, surtout si l’on ne retient que ces signes négatifs qui nous font souffrir. Mais, au sein même de ces phénomènes d’usure et de stérilité, se manifeste aussi une capacité de renouvellement ».[31] Constatant cette capacité, il ne s’arrête pas là, mais continue sa démonstration : « ce n’est pas un bilan qui nous est demandé, mais un acte de discernement, c’est-à-dire une véritable capacité de regarder au-delà des apparences immédiates, telles que les sondages et les statistiques les évoquent, pour chercher à voir comment le courant de la vie chrétienne au sein même de nos épreuves, continue à passer et à creuser des sillons à l’intérieur de ce qui est marqué par l’usure et le désenchantement ».[32] C. Dagens garde donc l’espérance. Il croit que l’Eglise, face justement à la crise, se voit en un certain sens, contrainte par les circonstances à évoluer ; elle peut encore changer son visage et redevenir utile à la société.

Remarquons que cet auteur fait aussi référence à la pensée de Marcel Gauchet. Plus encore, il en utilise les réflexions, qui, selon lui, peuvent être très utiles pour l’avenir de l’Eglise. Il se déclare d’accord avec ce penseur qui estime que rien n’interdit aux religions dans le cadre de la neutralité de l’Etat, de participer aux délibérations collectives de la société et de mettre à disposition de tous ce qu’elles ont de spécifique.[33] Il précise ainsi la responsabilité des chrétiens d’aujourd’hui dans la sphère publique non religieuse : « proposer une version de l’ensemble social conforme aux valeurs religieuses, mais qui soit respectueuse, simultanément, du caractère non religieux de cet ensemble. La tâche requise, en d’autres termes, est de définir un civisme chrétien ».[34] Qu’est-ce que cela veut dire concrètement ?

Dagens, lui-même, essaie de donner une réponse qui définisse le rôle des chrétiens dans la société. Il déclare : « Cela devrait être clair: la logique intérieure à la vie et à la mission chrétiennes n’est pas une logique de séparation, mais une logique de présence, d’engagement, de relations ouvertes, de proposition positive de la foi ». On a raison d’évoquer alors le témoignage de cet auteur inconnu du IIIème siècle qui expliquait ainsi le rôle des chrétiens dans le monde païen : « Ce que l’âme est dans le corps, les chrétiens le sont dans le monde. L’âme est comme enfermée dans la prison du corps, mais c’est elle qui soutient le corps... Les chrétiens sont comme détenus dans la prison du monde, ce sont eux pourtant qui soutiennent le monde » (Lettre à Diognète, CERF, Paris, coll. Sources chrétiennes 33bis, p. 67) ».[35] Qu’est-ce que cela veut dire seulement aujourd’hui, après dix-huit siècles d’évolution de la société et de la chrétienté : « devenir l’âme de la société » ? Et dans quel but le christianisme souhaiterait-il rester ou redevenir « l’âme de la société » ?

De nouveaux horizons de recherche s’ouvrent donc devant nous et se révèlent riches d’analyses potentielles.

En un premier temps, il y aurait un important effort à déployer pour cerner avec un peu plus d’attention la définition du « religieux », celui-là même qui, selon Marcel Gauchet, opère un retour, après la disparition de la religion. Alors, si ce retour se confirme, quel rôle peut-il jouer dans l’avenir ? Aurait-il la force de transformer, de bouleverser une fois de plus la société contemporaine ?

 

4. Détermination des concepts centraux

Pour cela, il faudrait observer attentivement la société toujours en évolution, distinguer de nouveau le concept de « religion » et celui  de « religieux » : « Entendons par religieux, écrit Alain Caillé, l’ensemble des relations créées et entretenues par la société des humains vivants et visibles avec l’ensemble des entités invisibles (défunts, non-nés, esprits des animaux, des minéraux ou des corps célestes, esprits flottants et non affectés). Ou encore la relation de la société des humains avec la société universelle des invisibles étendue jusqu’à l’infini et à l’éternité. Ajoutons encore que le religieux est, conjointement mais dans des proportions infiniment variables, le fait des sociétés et/ou des individus dont elles se composent. (…) Il est à la fois ce qu’il y a de plus collectif et ce qu’il y a de plus individuel. Produisant l’identité des sujets humains en les mettant en rapport avec l’infinité du symbolisable, le religieux énonce qu’ils n’ont d’identité que rapportée à ce qui l’excède infiniment. Il ouvre ainsi le champ de l’insatisfaction et du sens ».[36] Alain Caillé nous ouvre donc à la complexité de la notion du religieux. Celui-ci varie encore selon qu’on l’envisage sous son aspect individuel ou qu’on l’analyse sous son aspect communautaire.

Pour bien le différencier du mot « religion », il faut souligner, selon la pensée de Caillé, que la « religion est le lieu d’une interprétation déterminée du religieux ; elle vise au monopole du croire, de l’action rituelle et du savoir légitimes en structurant le moment instituant du religieux. La religion procure au sujet social la vie et/ou la mort symbolique. (…) La religion gère le rapport au temps et au non-contemporain, à la tradition, au don intertemporel ; elle a une fonction de conservation et de domestication du religieux qui est, lui, potentiellement révolutionnaire, comme la politique gère le rapport à l’espace entre contemporains et tempère le politique, source de l’a(d)venir ».[37] Nous pouvons donc comprendre la religion comme l’ensemble des structures dans lesquelles le religieux réagit. Cet ensemble prétend parfois rivaliser avec les systèmes, notamment celui de la politique, pour enraciner ses principes. Cependant, l’absence de pondération rationnelle pourrait produire de vives tensions.

            Dans ce contexte, il est impossible de ne pas parler de « religions séculières ». On peut comprendre celles-ci comme « les discours politiques qui imposent un ‘croire en’ au nom d’un supposé ‘croire que’, qui énoncent des propositions normatives imprescriptibles, inviolables, au nom de propositions censément positives et expurgées de toute charge normative. Qui subordonnent la croyance positive à la foi et à l’espérance, mais au nom de la croyance positive ; qui affirment que la nécessité d’arrimer le ‘croire que’ au ‘croire en’ est le résultat imposé non par les invisibles, réputés inexistants, mais par la seule logique positive du ‘croire que’ ».[38]

Il faudrait donc conférer à ce concept une acception plus large : les nouvelles communautés chrétiennes, les sectes, la magie (voyance, horoscopes), mais aussi, la mondialisation, le système politique démocratique incontrôlé – le libéralisme, ainsi que l’écologie, la vie et le culte des produits « bio », …

            Marcel Gauchet nous invite, cependant, à ne pas abandonner tout de suite une définition classique de la religion, qui peut nous être encore utile dans la construction de la société. Il appelle à reconnaître que nous devons quelque chose « à l’héritage immémorial des religions : d’avoir pouvoir sur notre monde et d’être en mesure d’ambitionner davantage de pouvoir encore ».[39]

Il exprime même ses inquiétudes à propos du risque que nous courons de perdre à jamais ce pouvoir : « La thèse que je voudrais défendre est que nous devions tous quelque chose à la religion, jusqu’à une date récente - abstraction faite de quelque croyance, affiliation ou engagement que ce soit - et que nous avons tous perdu quelque chose dans l’immense tournant qui nous emporte depuis une trentaine d’années et qui, entre autres, est en train d’achever de liquider les vestiges d’organisation religieuse qui subsistaient parmi nous. Quelque chose qui a directement à voir avec ‘la déshumanisation du monde’ qui nous inquiète ».[40]

            Cette thèse et les inquiétudes qu’elle contient semblent être partagées, dans le cadre d’éducation par Dominique Borne, anciennement engagé dans l’Inspection générale de l’Education nationale, qui déclare : « Au cours des années 80, il est apparu que les références religieuses présentes dans le patrimoine culturel étaient devenues très largement hermétiques aux élèves. Une ignorance explicable certes par le mouvement de sécularisation de la société, mais aussi par la crise des humanités. Les ministres successifs de l’Éducation nationale ont alors eu pour souci une meilleure transmission du fait religieux dans le cadre des différentes disciplines enseignées, ce qui ne contredit pas le caractère laïque de l’école puisqu’il s’agit simplement de considérer le religieux comme un élément parmi d’autres de la mémoire et de l’histoire. Depuis une vingtaine d’années les meilleurs esprits s’inquiètent de la disparition des connaissances qui permettaient de donner sens aux monuments, aux œuvres et aux textes qui constituent notre patrimoine, notre paysage et notre environnement culturel. Tout un pan du patrimoine est devenu muet. L’inculture atteint aussi les œuvres écrites ».[41] D. Borne appelle alors à la raison, pour ne pas tenter d’oublier au moins certains aspects de la religion qui peuvent se révéler précieux pour l’enseignement. Concrètement il s’agit ici de certaines composantes notamment celles qui témoignent de la constitution du patrimoine et de la culture. Ce regard peut se révéler étroit, mais ne doit en aucune façon aboutir à une négation.

Il n’hésite pas à citer ici le professeur Philippe Joutard qui en septembre 1989, remettait au ministre de l’Education nationale un rapport sur l’enseignement de l’histoire et de la géographie. Le quinzième point de ce rapport propose : « Pour combler une grave lacune culturelle de notre société et pour permettre aux élèves de comprendre les réalités historiques passées et présentes, il est indispensable d’accorder à l’histoire des religions une place importante ».[42]

Il serait difficile de ne pas se sentir d’accord avec cette constatation que la disparition de la culture religieuse ne s’explique pas seulement par la sécularisation des sociétés et l’affaissement des pratiques religieuses. La culture religieuse est victime d’une double crise, celle très générale de la transmission des connaissances et celle plus spécifique de ce qu’on appelait volontiers « naguère » les humanités.

La « Loi Ferry » de 1882, stipulant que l’instruction n’est plus morale et religieuse, aboutit à la transformer en instruction morale et civique. Depuis, la situation a radicalement changé. C’est parce que le religieux occupe dans la société une place différente, que l’on peut envisager aujourd’hui un enseignement des faits religieux dans une école toujours parfaitement laïque.

 

5. Conclusion

Il nous semble qu’ici trois interrogations s’imposent :

« 1° dans quelle mesure une société moderne, rationalisée, spécialisée et vouée à l’utilitarisme économiciste peut-elle se dispenser de s’appuyer sur les restes d’une religion historique et de s’en nourrir ?

2° dans quelle mesure une société peut-elle vivre et se définir sans un certain stock de valeurs et de croyances communes ?

3° dans quelle mesure des valeurs proprement laïques – s’abstenant de toute référence à une transcendance quelconque - peuvent-elles jouer le même rôle que les croyances religieuses disparues ? »[43]

En vue de la participation constructive à la vie de la société il se révélerait non pas seulement intéressant, mais avant tout précieux et vital de trouver des réponses au plus vite à ces questions essentielles…

 


[1] Jean-François Lyotard (1924-1998), philosophe, écrivain, essayiste français, membre du Collège International de Philosophie, associé au poststructuralisme et généralement reconnu pour sa théorie de la postmodernité (« hypermodernité »). Auteur de très nombreux articles et d’une trentaine de livres où la philosophie est étroitement mêlée aux questions de l’art, de la littérature, de la psychanalyse, de l’histoire.

[2] Marcel Gauchet, philosophe français, né en 1946. Issu d’un milieu modeste, entre à l’Ecole Normale d’Instituteurs puis, après une maîtrise de philosophie, se lie avec Claude Lefort et surtout Pierre Nora, avec qui il fonde Le Débat. S’intéressant à l’Etat, la laïcité et la religion, il publie Le désenchantement du monde en 1985, ouvrage majeur qui le rend célèbre. Pour Gauchet, l’ébranlement de la société traditionnelle laïque suscite la chute du religieux : c’est à la lumière de l’histoire qu’il illustre sa théorie philosophique, soutenant que l’absolutisme royal, en abusant du pouvoir, a dépassé et discrédité le religieux dont il se réclamait. Jusqu’à un point de non-retour.

Gauchet estime que le christianisme est « la religion de la sortie de la religion », c’est-à-dire une religion qui contient potentiellement en elle-même la dynamique de sécularisation. Cette sécularisation (ou « désenchantement du monde ») ne signifie pas la fin des croyances privées personnelles, mais que désormais la religion ne structure plus la société, elle n’en est plus le principe d’organisation ou de légitimité.

[3] M. Gauchet, Désenchantement du monde. Une histoire politique de la religion, Paris 1985, pp. 125-126.

[4] Henri Grégoire, né en 1750, député aux Etats-généraux, député à la Convention nationale et au Conseil des Cinq cents, législateur, membre de l’Institut de France, sénateur, comte, commandant de la Légion d’honneur. Il fut le premier ecclésiastique qui prêta le serment constitutionnel et élu évêque constitutionnel de Blois. Il sollicita, en 1791, les droits de citoyen actifs pour les gens de couleur, et se montra, dans toutes les circonstances, l’apologiste de leurs revendications. Il fit plusieurs rapports contre les « terroristes », qu’il qualifia de « vandales », pour la destruction des monuments des arts et, depuis cette époque, parla souvent en faveur de la liberté des cultes.

[5] Bernard Stiegler, né en 1952, est le directeur de l’Institut de Recherche et d’Innovation du Centre Georges Pompidou, professeur associé à l’Université de Londres  (Goldsmiths College)  et  à l’Université de Technologie de Compiègne, est philosophe et docteur de l’Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales. Il a été directeur de programme au Collège International de Philosophie, directeur de l’unité de recherche Connaissances, Organisations et Systèmes Techniques, qu’il a fondée en 1993. Directeur adjoint de l’Institut National de l’Audiovisuel, directeur de l’IRCAM, puis directeur du département du développement culturel du Centre Georges Pompidou. Cofondateur d’Ars Industrialis, l’Association internationale pour une politique industrielle des technologies de l’esprit.

[6] B. Stiegler, Réenchanter le monde : La valeur esprit contre le populisme industriel, Paris 2006, p. 73.

[7] Ibid., p. 12.

[8] Ibid., p. 13.

[9] Ibid., p. 14.

[10] L’« individuation », nous dit Stigler, n’est pas l’individualisation. C’est la formation de l’individu en tant que, demeurant toujours inachevé, est lié à d’autres individus, à des groupes, avec lesquels il « s’individue ».

[11] B. Stiegler, Réenchanter le monde : La valeur esprit contre le populisme industriel, (op. cit.), p. 17.

[12] D.-R. Dufour, Le Divin Marché. La révolution culturelle libérale, Paris 2007, p. 91.

[13] Joseph Famerée, né en 1955, est le professeur d’ecclésiologie, d’œcuménisme et de théologie des Églises orientales à l’Université catholique de Louvain (Louvain-la-Neuve, Belgique). Il a publié plusieurs études sur Yves Congar, Vatican II, l’ecclésiologie et diverses questions œcuméniques. Il est membre de l’Académie internationale des sciences religieuses, ainsi que du Groupe des Dombes. Il fait partie du présidium de l’Association européenne de théologie catholique.

[14] J. Famerée, Les grands défis de l’Eglise catholique à l’heure de la mondialisation, dans : Démocratie dans les Églises. Anglicanisme – Catholicisme – Orthodoxie – Protestantisme (Coll. Trajectoires, 10), Bruxelles 1999, pp. 11-12.

[15] Ibid., p. 12.

[16] Patrick Berthier, Docteur en Sciences de l’Education et Agrégé de Philosophie, a été Professeur de Psychopédagogie des Instituts Universitaires de Formation des Maîtres. Maître de conférences au département des Sciences de l’Education et Formation de l’Université de Paris 8 Vincennes à Saint Denis depuis 1991. Dans ce département, il poursuit des recherches et dirige des travaux dans le domaine de la philosophie de l’éducation. Actuellement il développe des travaux sur le pragmatisme, la philosophie de la culture dominante et sur l’éducation de la volonté.

[17] P. Berthier, Une morale sans fondement, dans : De l’éthique professionnelle en formation et en recherche, Recherche et formation pour les professions de l’éducation, n° 52, 2006, p. 19.

[18] M. A. Peeters, La nouvelle éthique mondiale : défis pour l’Eglise, Paris 2007, p. I.

[19] J. Famerée, Les grands défis de l’Eglise catholique à l’heure de la mondialisation, (op. cit.), p. 12.

[20] M. Gauchet, L. Ferry, Le Religieux après la religion, Paris 2004, p. 7.

[21] M. Gauchet, Désenchantement du monde, (op. cit.), p. 9.

[22] M. Gauchet, L. Ferry, Le Religieux après la religion, (op. cit.), pp. 7-8.

[23] Ibid., p. 9.

[24] M. Gauchet, Désenchantement du monde, (op. cit.), p. 58.

[25] M. Gauchet, L. Ferry, Le Religieux après la religion, (op. cit.), p. 9.

[26] M. Gauchet, Un monde désenchanté ?, Paris 2004, p. 13.

[27] D.-R. Dufour, Le Divin Marché. La révolution culturelle libérale, Paris, (op. cit.), p. 119.

[28] M. Gauchet, Un monde désenchanté ?, (op. cit.), p. 14.

[29] Ibid., p. 15.

[30] Claude Dagens, né en 1940, l’évêque auxiliaire de Poitiers (1987-1993), depuis 1993 l’évêque d’Angoulême, membre de la Commission doctrinale, Président du Groupe de travail sur l’indifférence religieuse et la visibilité de l’Eglise catholique. Agrégé de l’Université, Docteur ès lettres et en théologie, Licencié de l’Institut pontifical d’archéologie chrétienne, Doyen de la Faculté de théologie de Toulouse (1981-1987), ancien évêque du comité national d’Art-sacré, membre du comité « Etudes et Projets » de la Conférence des évêques de France.

[31] C. Dagens, Méditation sur l’Eglise catholique en France : libre et présente, Paris 2008, p. 143.

[32] Ibid., p. 44.

[33] Ibid., p. 34.

[34] M. Gauchet, Un monde désenchanté ?, (op. cit.), p. 243.

[35] C. Dagens, Méditation sur l’Eglise catholique en France : libre et présente, (op. cit.), p. 33.

[36] A. Caillé, Nouvelles thèses sur la religion, dans : Qu’est-ce que le religieux ? Religion et politique, Revue du Mauss, 2/2003 (n° 22), p. 316.

[37] Ibid., p. 319.

[38] Ibid., p. 322.

[39] M. Gauchet, Ite missa est. Polis et religio. Quelle conception de la religion ? Ce que nous avons perdu avec la religion, dans : Qu’est-ce que le religieux ? Religion et politique, Revue du Mauss, 2/2003 (n° 22), p. 314.

[40] Ibid., p. 312.

[41] D. Borne, Transmettre les dimensions religieuses des cultures à l’école laïque ?, dans : Les religions dans la société, Cahiers français n° 340, 2007, p. 15.

[42] Ibid., p. 17.

[43] A. Caillé, Nouvelles thèses sur la religion, dans : Qu’est-ce que le religieux ? Religion et politique, (op. cit.), pp. 322-323.